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9 janvier 2023

Une femme d’Annie Ernaux – éditions Folio

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Suite au décès de sa mère le 7 avril 1986, Annie Ernaux a ressenti le besoin d’écrire sur celle qui lui a donné la vie. Dans les premières pages, l’autrice commence par la fin. Ce moment terrible où l’on découvre effroyablement que c’est fini. Que ce ne sera plus.

La découverte du cadavre après la toilette, les premières démarches administratives qui doivent être effectuées dans la foulée, le transport à la morgue, le choix du cercueil, la rencontre avec le fleuriste, l’inhumation…La mort a son langage et ses rituels. Puis l’ultime voyage vers le cimetière.

La semaine suivante, c’est le choc. La prise de conscience de la réalité. Le sommeil détraqué, la difficulté d’accomplir la moindre tâche ménagère. Face à la dépression, Annie Ernaux déclare : « Lire était impossible ».

Le choix de rendre un dernier hommage s’est alors imposé pour raconter l’histoire de cette seule femme qui ait vraiment compté pour elle. L’autrice remonte le temps, déroule le fil de l’existence de sa mère née dans un quartier rural d’une petite ville de Normandie. Issue d’une famille nombreuse populaire, elle a quitté l’école à douze ans comme bien d’autres jeunes à l’époque. « Personne ne poussait ses enfants. »

Plus tard, elle deviendra ouvrière puis gérante d’un commerce. L’autrice nous offre le portrait d’une mère de famille anxieuse de « tenir son rang » et dont le désir le plus profond était d’offrir à sa fille tout ce qu’elle n’avait pas eu. Bien que le rapport entre la mère et la fille fut tendu lors de l’adolescence, Annie Ernaux reconnait que grâce aux efforts de sa mère, elle a pu faire de longues études et entrer à la faculté de lettres. Devenir étudiante signifiait accéder à une autre classe sociale et fréquenter des gens n’ayant pas forcément les mêmes codes que ceux de ses parents.

Ce livre m’a été prêté par Aline qui a beaucoup d’admiration pour le travail d’Annie Ernaux. J’ai eu les larmes aux yeux en fermant ce livre qui parle du deuil. De nombreux détails ou anecdotes dans ce récit ont eu une résonnance avec mon histoire.

J’ai été touchée par le portrait de la mère qui appartient à une génération de femmes qui ne s´écoutaient pas, qui tiraient de la satisfaction dans l’accomplissement de tâches difficiles et dans la réussite sociale de leurs enfants.

Le livre est intitulé « Une femme » mais derrière le visage de sa mère se profile aussi au fil des pages celui de sa fille : son enfance, son adolescence, son mariage, sa vie de famille et le choix d’accueillir sa mère chez elle puis de la placer à cause de la maladie qui détruisait sa mémoire. Ce livre soulève la question de la fin de vie de nos proches (les dispositions à prendre, la dégénérescence, le syndrome de glissement…)

Annie Ernaux utilise un style économique qui en apparence peut paraitre simple mais qui finalement ne l’est pas. C’est une écriture qui va droit au but, lâchée comme un souffle, un jet d’encre indispensable pour écrire son histoire et la faire revivre à travers les mots. J’ai apprécié également le partage des phrases souvent prononcées par sa mère qui nous plongent dans un contexte lointain.

Ce n’est pas une biographie ni un roman naturellement. C’est un très beau témoignage sur une femme courageuse, un court ouvrage qui se situe entre la littérature, la sociologie et l’histoire.

Merci beaucoup Aline pour la recommendation. 

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