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21 mars 2022

La carte postale d’Anne Berest – éditions Grasset

la carte postale

Au départ, c’est une simple carte postale sur laquelle figurent quatre prénoms : Ephraïm, Emma, Noémie, Jacques. Il n’y a pas de signature et l’écriture est maladroite. Toutefois, ces quatre identifications ne sont pas étrangères puisqu’ils correspondent aux grands-parents maternels de la narratrice, ainsi que son oncle et sa tante. Tous les quatre avaient été déportés deux ans avant sa naissance. Ils étaient morts â Auschwitz en 1942. Ils ressurgissent curieusement dans la boîte aux lettres soixante et un an plus tard. Lundi 6 janvier 2003.

A partir de ce découverte inattendue, la narratrice mène l’enquête auprès de sa mère et des archives afin de remonter le temps et savoir qui peut bien avoir écrit et posté cette fameuse carte postale. Ce roman historique nous plonge donc dans l’histoire de la famille Rabinovitch depuis 1819. On y énumère dès le début les listes des restrictions imposées aux juifs (interdiction d’aller à l’université, interdiction de se déplacer d’une région à l’autre, interdiction de donner des prénoms chrétiens aux enfants…). Face à cette pression grandissante, le patriarche ordonne à ses enfants de quitter le pays. Les parents partent vers la Palestine alors que les frères et sœurs sont éparpillés aux quatre coins de l’Europe. Leur fuite de Russie conduit Ephraïm et sa famille en Lettonie, puis en Palestine et enfin à Paris où en dépit de multiples démarches, il n’arrive pas à obtenir sa naturalisation française. En septembre 1939, la pression ne cesse d’augmenter. Je cite : « Des évènements terribles ont précipité les juifs hors du pays, du jour au lendemain. Certains sont partis en prenant ce qu’ils pouvaient dans une valise, laissant tout derrière eux. ».

Dès le début, nous connaissons l’issue tragique qu’ils devront malheureusement affronter. Ecrire les détails de leur histoire, c’est rendre hommage à cette grand-mère Myriam qui fut la seule à échapper à la déportation.

2022. Lorsqu’on se réveille, la première chose qu’on se rappelle, c’est qu’encore aujourd’hui des hommes et des femmes sont en train de se battre, de lutter, de mourir. Certains choisissent de rester, d’autres fuient dans la précipitation, emportant l’essentiel tout en formant un long cortège de peine et de douleur.

De nouveau, l’exil.

De nouveau, l’exode.

On a du mal à y croire et pourtant c’est vrai. Lire ce roman est une quête initiatique sur la signification du mot « juif » dans une existence laïque. J’ai été frappée par l’écriture de certains évènements ou détails qui résonnent tellement avec l’actualité que nous traversons actuellement. Le roman construit de manière chronologique nous permet vraiment de saisir l’évolution de personnages qui ont pu connaitre dans leur vie des moments de joie pour ensuite basculer dans l’horreur. La référence à Irene Némirovsky page 66 puis le rappel de sa mort m’ont frappé de nouveau de plein fouet. Elle, puis tant d’autres ainsi que ses quatre personnages ont leurs noms inscrits à jamais sur la couverture d’un livre. Honorons-les.

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