Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Après avoir lu
Visiteurs
Depuis la création 223 295
Publicité
Archives
Newsletter
8 janvier 2020

Suite française d' Irène Némirovsky - éditions Folio

Chapitre 10

Dans le chapitre 10, la famille Péricand poursuit son voyage dans des conditions terribles et chaotiques. Ils ont eu des problèmes avec leur voiture et la métaphore suivante « la panique grandissait, se répandait d´une ville à l’autre comme une flamme » montre que la peur est un sentiment qui se propage comme une traînée de poudre. De plus, la pénurie d’essence inquiète les automobilistes. La citation suivante souligne le chaos : « Les voitures attendaient le jour pour s’approvisionner en essence. Déjà elle manquait. » La confusion règne dans le village car « on demandait des nouvelles aux réfugiés. Ils ne savaient rien. »

Dans ce chapitre, l’auteur peint une image de la France en proie à l´angoisse. Elle analyse le chaos et l'errance qui règne en France à cette époque. Elle met en scène des personnages menacés par le désordre, la peur, l’errance, la perte, mais qui tentent de «résister », de s’en sortir en prenant les chemins de l’exode. Les gens sont fatigues, cherchent désespérément un endroit pour dormir ou quelque chose à manger. Les réfugiés sont épuisés de marcher sous le soleil. Analysons les citations suivantes : « Il y avait trop de réfugiés. Il y avait trop de figures lasses, livides, en sueur, trop d’enfants en pleurs, trop de bouches tremblantes qui demandaient : Vous  ne savez pas ou on peut trouver une chambre ? Vous ne pourriez pas nous indiquer un restaurant, madame ? ». Dans cet extrait, la répétition de l’adverbe d'intensité « trop » vient renforcer l’image d'une foule hagarde, vide, lasse, à la recherche d’une solution, voir d'un miracle. Outre le thème du manque de vivres, la question que soulève Tempête en juin est celle du véhicule qui permettrait d’échapper aux Allemands. Ceux qui disposent d’une voiture sont des privilégiés et sont prêts à tout pour continuer leur voyage.

Par ailleurs, nous remarquons que dans ce contexte alarmant les gens sont guidés par l’individualisme. La citation « aucun n´avait l’idée d’ouvrir sa porte, d’inviter chez lui un de ces malheureux, de le faire pénétrer dans un de ces paradis ombreux. » montre que les plus privilégiés ne pensent qu’à eux. Ils ne font pas preuve de solidarité. « Cela décourageait la charité ». Irène Némirovsky va même jusqu'à dire que  « cette multitude misérable n’avait plus rien d´humain ; elle ressemblait à un troupeau en déroute ». Une fois de plus, l’auteur compare les victimes avec des animaux qui agissent en suivant le cours des événements, impuissants et fragiles.

Dans le chapitre 10, une des réflexions d'Hubert nous fait également sourire. Alors que la pénurie d'aliments inquiète les habitants, Hubert annonce à sa mère qu'il a trouvé deux boutiques bien garnies. Sa mère, surprise lui demande où elles sont. Ce à quoi, il répond qu'elles vendaient « des pianos et des articles funéraires ». L'humour est cynique mais il montre aussi le besoin d’être léger dans les moments graves. L'innocence et la naïveté d'Hubert permet à l'autrice d'utiliser le registre comique dans un contexte tragique.

Les Péricand réalisent que dans les villages il n'y a plus rien à manger.

ch1

Au départ, Mme Péricand n'est pas pleinement consciente de la gravité de la situation, si bien qu'elle encourage ses enfants à partager leur nourriture. « C'est le moment de mettre en pratique ce que tu as appris au catéchisme ». Mais curieusement, elle partage ses vivres avec les enfants « de bonne famille ». Dans l’église, les femmes pleurent leur désarroi. Lorsque Mme Péricand comprend qu'il n'y a plus rien dans les magasins, elle met de côté sa « charité chrétienne ». Elle sait désormais qu'ils « étaient seuls dans un monde hostile, ses enfants et elle. Il lui fallait nourrir et abriter ses petits. Le reste ne comptait plus ». Cette ultime phrase vient sonner le glas. Elle annonce la fin du partage et la nécessité de se préoccuper uniquement de ses proches.  On peut évidemment s'interroger sur l’authenticité de la foi chretienne de Mme Pericand dans ce passage. 

ch10

Le narrateur omniscient décrit les sentiments des personnages, et la laideur de la nature humaine est une manifestation souvent répétée. Les personnages sont unifiés par la guerre qui les pousse sur la route. Le sujet est évidemment sinistre, mais ce qui est aussi pessimiste c'est l’impuissance de l’homme qui fait face à la fatalité.

Chapitre 11

Le début de ce chapitre montre les difficultés ressenties par les marcheurs qui traversaient la France, ceux qui voulaient fuir « la France qui était en flammes ».   Tous sont terrassés par la fatigue, la faim et l’inquiétude. « Les pauvres, les malchanceux, les faibles » n'ont pas de voiture donc on comprend facilement que physiquement l'exode est beaucoup plus éprouvante pour eux.

Le sentiment de désespoir est très présent car le peuple perd la face. Ils envisagent de mourir sur la route. « Quand ils se laissaient tomber sur le sol, ils disaient qu'ils ne se relèveraient plus, qu'ils crèveraient la, que mourir pour mourir, autant valait rester tranquille ». Notons au passage que l'utilisation du verbe « crever » appartient au langage familier et vient renforcer l’idée que cette « multitude confuse » de marcheurs n'a plus rien d'humain. Personne ne semble se soucier de leurs sorts. Ils sont complètement livres à eux-mêmes.

Mais dans ce contexte terrible, une citation  montre que la notion d'entraide est différente chez les pauvres, les malchanceux que chez les bourgeois. Page 101 « Il y avait entre eux de la pitié, de la charité, cette sympathie active et vigilante que les gens du peuple ne témoignent qu'aux leurs ». Cette citation montre que « malgré la fatigue, la faim, l’inquiétude »les pauvres s’entraident. Leur élan de générosité contraste fortement avec l'attitude de Mme Pericand qui ne pense qu'à elle et se comporte en fausse chrétienne.

Dans Tempête en juin, les personnages sont nombreux. La plupart de ceux -ci possèdent des caractères relativement négatifs, et il n’y a guère qu’un seul couple qui soit vraiment noble. Seuls les Michaud sont attachants de par leur bienveillance. « Elle même tenait des enfants par la main tandis que son mari chargeait sur sur son épaule tantôt un ballot de linge... ». Ils agissent avec courage et leur attitude souligne leur générosité et leurs valeurs humaines. Mr Michaud est un personnage unique dans le roman dans la mesure ou il ne se plaint pas. « Il n'attachait pas beaucoup d'importance a lui même ». Il est très humble et ne se considère ni « rare » ni « irremplaçable ». « Il se souvenait que les exodes avaient eu lieu de tout temps ». Les commentaires d’Irène Némirovsky sont encore valables aujourd'hui car aujourd'hui les flux migratoires de population ne cessent d'augmenter, aboutissant parfois à des scénarios catastrophiques pour ensuite être récupérés par certains partis politiques, ne manquant pas de transformer la tristesse en polémique.

Madame Michaud est toujours plongée dans l’inquiétude. Sans nouvelles de son fils, elle croit le voir, comme « une sorte d'hallucination. » Une fois de plus, l'autrice utilise une aposiopèse quand elle écrit : « Oh ! Maurice, ce n'est pas... ». Cette figure de style renforce sa peine légitime. Le lecteur partage sa douleur.  

ch3Ce chapitre se termine avec la scène terrible des bombardements. Quand les ennemis ont commencé a mitraillé, ce fut l’incompréhension générale.Les Michaud ont survécu a cette tuerie massive. Mais malheureusement ils découvrent des cadavres. Les descriptions crues sont fréquentes et la puissance du langage frappe le lecteur. En lisant cette scène, le lecteur peut ressentir de l'effroi (« leurs corps étaient déchiquetés » et un sentiment d'injustice car la guerre frappe au hasard des personnes innocentes. Le lecteur a pitié et peur pour l'avenir des Michaud.
Le dernier paragraphe dresse une succession de questions. « Pourquoi ? La banque existait-elle encore ? M. Corbin n'etait-il pas enterre sous;es decombres avec ses dossiers ? Ses valeurs ? Sa danseuse ? ». La multitude d'interrogations vient ici questionner le sens de ce voyage. A quoi sert-il, si ce n'est de servir l’incompréhension et le doute ?

ch4

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité